Doute sérieux quant à la légalité de la décision

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Le juge des référés peut reconnaître, au moment où il statue, un doute sérieux quant à la légalité de la décision lorsque les mesures destinées à éviter, réduire et compenser les impacts sur l’environnement apparaissent comme insuffisantes. L’ordonnance de référé n’est pas un examen au fond du litige, le juge ne doit pas porter une appréciation définitive sur la légalité de l’autorisation.  
 

Décisions du Conseil d'Etat

 

Le projet d'aménagement routier contesté a été précédé de l'examen approfondi de tracés alternatifs dont aucun n'apparaît constituer une alternative plus favorable en termes d'atteinte aux espèces protégées. Le projet comporte des mesures d'évitement, de réduction et de compensation nombreuses et étayées permettant de limiter les atteintes occasionnées par le projet aux espèces protégées. A la suite d’avis négatifs, le projet a été modifié pour augmenter les surfaces dédiées aux mesures de compensation. Dès lors, ces éléments ne sont pas de nature à faire apparaître un doute sérieux quant à la légalité de la décision.


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Le juge des référés, en première instance, a retenu un doute sérieux quant à la légalité de la décision litigieuse en raison de l'insuffisance des mesures de compensation à la destruction et à l'altération de zones humides, au regard des exigences fixées par le code de l'environnement et le schéma directeur d'aménagement et de gestion des eaux (SDAGE) Rhône-Méditerranée. Le Conseil d’Etat considère, quant à lui, que l'arrêté litigieux comprend des prescriptions relatives aux mesures de compensation supplémentaires qui sont compatibles avec le SDAGE et notamment avec le respect de la valeur guide de l'ordre de 200 % que celui-ci détermine. Le juge des référés, en première instance, a commis une erreur d’appréciation, puisque ces mesures n’apparaissent pas comme insuffisantes.


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Décisions des tribunaux administratifs

 

Eu égard aux pièces fournies au juge, la condition du doute sérieux quant à la légalité de la décision n’est pas remplie alors même que l’arrêté préfectoral attaqué ne répondrait pas aux trois conditions, tenant à l’absence de projet alternatif, à ce que le projet réponde à une raison impérative d’intérêt public majeur et la dérogation ne nuise pas au maintien de l’espèce dans son aire de répartition naturelle. Plusieurs méthodologies de débardage ont été envisagées, telles que le débardage par câbles (jugé trop coûteux), le débusquage à cheval (estimé inadapté du fait de la pente et des distances à parcourir) et, le tracé finalement retenu, limité à 1 659 mètres, a abaissé à 12 le nombre de stations de Buxbaumia viridis potentiellement atteintes par le projet. Les mesures de réduction et de compensation imposées par le préfet, consistant à déplacer systématiquement tous les bois morts au sol et à laisser au sol certains éléments de coupe afin de favoriser leur colonisation future, sont susceptibles de réduire suffisamment les impacts du projet. Enfin, eu égard à la particularité de la Buxbaumia viridis qui est une espèce de mousse se développant majoritairement sur des bois pourrissants de conifères au sol, la dérogation accordée, assortie des mesures de réduction et de compensation, ne nuit pas au maintien dans un état de conservation favorable de l’espèce dans son aire de répartition naturelle.


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L'arrêté litigieux énonce que les mesures d'évitement, de réduction et de compensation décrites dans l'arrêté permettent de concilier les différents enjeux en présence, ce qui constitue une raison impérative d'intérêt public majeur. Le préfet, en prenant en compte les mesures d'évitement, de réduction et de compensation pour justifier de raisons impératives d'intérêt public majeur autorisant une dérogation à la conservation d'espèces animales protégées et de leurs habitats, a commis une erreur de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de l'arrêté attaqué. La condition d'urgence étant également remplie, le juge prononce la suspension de l'arrêté. 

 

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L'arrêté contesté énonce « qu'eu égard aux effets socio-économiques attendus et aux mesures d'évitement, de réduction et de compensation décrites dans le présent arrêté, qui permettent de concilier les différents enjeux en présence, le projet constitue une raison impérative d'intérêt public majeur ». En prenant en compte les mesures d’évitement, de réduction et de compensation des atteintes aux espèces protégées pour justifier de raisons impératives d’intérêt public majeur, le préfet a commis une erreur de droit de nature à créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision. Toutefois, les travaux ont été déclarés d’utilité publique et urgents : une suspension porterait alors une atteinte d'une particulière gravité à l'intérêt général.


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Les requérants soutiennent que les travaux visant à réaliser, sur le littoral, une réhabilitation de la plage par un rechargement en sable et la construction d'un nouveau cordon dunaire afin de lutter contre l'érosion marine, entraînera, de manière irréversible, la destruction d'espèces protégées alors qu'aucune mesure de compensation effective ne pourra être mise en œuvre. Les requérants contestent le caractère effectif des mesures de compensation et des mesures d'accompagnement alors que l’arrêté prévoit également des mesures de réduction afin de réduire l'impact des travaux sur les espèces dont les requérants n'allèguent pas qu'elles présenteraient un caractère insuffisant. Il n’est pas démontré que les travaux entraîneraient des conséquences telles pour les espèces protégées qu'ils rendraient nécessaires l'intervention de mesures de sauvegarde utiles dans un délai de quarante-huit heures.


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Plusieurs arguments sont de nature à faire naître un doute quant à la légalité de la décision, et en particulier l’insuffisance des mesures de compensation proposées. Le pétitionnaire ne prouve pas l’effectivité des mesures compte tenu de l’absence, pour une très grande partie, de maîtrise du foncier concerné par le projet.


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La réalisation des mesures de compensation est mise, par le préfet, à la charge d’une autre personne morale que le pétitionnaire, sur la base d’une simple lettre d’intention de l’exécutif de celle-ci et de l’inscription de crédits budgétaires en matière de forêts. Les mesures de compensation ainsi prévues, qui ne font peser sur le pétitionnaire que l’obligation de s’assurer du respect par un tiers d’engagements unilatéraux, sont dépourvues de réalité, et sont donc de nature à faire naître un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.


Cette obligation est désormais inscrite à l’article L.163-1 du code de l’environnement, disposant que « Dans tous les cas, le maître d'ouvrage reste seul responsable à l'égard de l'autorité administrative qui a prescrit ces mesures de compensation. »


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